Au printemps, un nouveau projet d’Éducation aux Médias et à l’Information (EMI) s’est mis en place avec un groupe de jeunes : un documentaire sur l’amour, en partenariat avec Mélanie Gilmant, animatrice d’ateliers philo pour enfants et réalisatrice du film documentaire « Ceux qui nous lient ».
Pour cet article, nous dérogerons à une règle centrale du journalisme : celle des 5W. Nous ne pouvons mentionner ni le commanditaire du projet ni l’identité des jeunes.
Ha l’amour ! Quand de nos échanges, a surgi cette idée, les jeunes hommes ont d’abord pris peur : « l’amour, c’est pour les filles ! » , « c’est privé ! », « bof ». Ce qu’ils ne savaient pas, c’est que durant toute la recherche de sujet du documentaire que nous allions tourner, c’était eux-mêmes qui parlaient d’amour sans même s’en rendre compte. Mélanie Gilmant, habituée à questionner les enfants et les jeunes durant ses ateliers philo, a interrogé le groupe sur sa définition de l’amour, et l’a guidé vers l’idée qu’on ne parlait pas seulement d’amour envers des personnes. Dès lors qu’ils ont réalisé cela, les jeunes hommes nous ont confié ce qu’ils aimaient dans la vie : les échecs, le football, les jeux vidéos… Nous tenions notre sujet !
Les tournages
Première étape : le micro-trottoir ! Après avoir préparé toute une liste de questions, nous sommes allé.e.s, équipé.e.s de nos caméras et micros, à l’Étang des Argales à Rieulay, avec l’idée d’interviewer un maximum de personnes. Les questions préparées par les jeunes pouvaient être parfois déroutantes : « qu’est-ce que l’amour pour vous ? », « quelle est la première personne que vous avez aimée dans votre vie ? », « quelle est la personne que vous aimez le plus ? » avant de glisser doucement vers la thématique des passions. Pour certains, c’était le vélo, pour d’autres les festivals ou encore la nature.
Puis, il était temps de tourner nos séquences, guidé.e.s par les passions des jeunes. Nous en avons retenu deux : les échecs et les jeux vidéos. Nous avons réussi à obtenir une visite dans les locaux de la société roubaisienne Ankama (merci Mélanie !), mondialement connu pour le jeu Dofus. Ce jour-là, c’était l’anniversaire de deux des jeunes et cette visite était pour eux comme un cadeau. Lorsque l’on est journaliste, nous avons accès à tout un tas de lieux et d’événements. Il est important pour nous, au-delà des objectifs d’éducation aux médias, de partager ce petit privilège avec les jeunes que nous accompagnons sur les projets. Puis vient le moment des interviews. Deux salariés ont accepté de répondre aux questions des jeunes sur les passions. Ce qui nous intéressait, c’était de comprendre ce qui pouvait animer une passion au point d’en faire son travail, ce que ressentent les gens lorsqu’ils s’adonnent à leur passion. Nous avons obtenu des réponses très intéressantes que vous aurez l’occasion de découvrir en même temps que le documentaire.
La suite des tournages s’est déroulée à Lille. Nous avons été accueilli.e.s par l’association LUC, échiquier du Nord, et son président Jean-Michel Lebret qui a partagé avec nous sa passion des échecs. Une jeune fille, Amel et un jeune garçon, Pierre-Aloïs, ont témoigné également au micro. Nos apprentis journalistes ont même pu échanger quelques parties avec ces joueurs habitués aux championnats.
Pour ces trois tournages, notre association s’est chargée de la partie technique, à savoir la prise de vue sur chaque séquence. Les jeunes étaient équipés d’une petite caméra de poing pour filmer les coulisses du reportage. Ils étaient aussi en charge du son (installation des micros, écoute au casque) et bien entendu, ce sont eux qui menaient les interviews. Mélanie Gilmant, quant à elle, a donné une tournure philosophique au projet en repoussant chaque fois les limites des questionnements des jeunes par rapport à la thématique de l’amour. Elle a vraiment guidé les jeunes sur le contenu du documentaire.
Les objectifs des ateliers
Ces projets de documentaire participatif nous permettent de sensibiliser les jeunes à l’information en la construisant par eux-mêmes. Selon nous, la meilleure façon de comprendre le monde des médias, c’est d’en faire partie, même si cela ne dure que le temps d’un projet. Nous n’espérons pas que grâce à nos ateliers, les jeunes deviennent journalistes, mais plutôt qu’ils puissent avoir un regard plus critique sur l’information ainsi qu’une consommation plus responsable de celle-ci.
Le travail de documentaire participatif permet également de donner une parole à des jeunes qui ne l’ont pas forcément. C’est une façon de leur dire « on vous écoute, peu importe ce que vous avez à dire », et « on vous suit, peu importe où vous voulez aller ». La thématique de l’amour est une bonne façon de les laisser nous guider, elle ouvre les portes à des sujets très larges. Nous avons partagé nos compétences avec eux et aidé à recadrer leur idées pour aller vers ce qu’ils aimaient, eux. Parce que nous avions envie de valoriser leurs passions et finalement ce qu’ils sont. Une fois cette porte entrouverte, ils ont appris à écouter celles et ceux qui sont passionné.e.s.
On pourrait dresser une liste d’objectifs divers et variés qui entrent dans des cases pré-remplies, mais le premier et principal objectif est de diffuser de la joie parmi les jeunes, leur permettre de prendre confiance en eux, d’accueillir leur parole et de la légitimer. Au fil du projet, nous avons appris à les connaître et nous avons même vu certains jeunes se questionner sur une possible carrière dans l’audiovisuel. Au final, peu importe s’ils veulent travailler dans ce domaine ou non, c’était peut-être une idée passagère. Mais celle-ci témoigne, au même titre que les sourires, d’un bien-être dans le projet.
Le documentaire participatif sera projeté au sein de la structure commanditaire à l’automne. Nous tâcherons de faire en sorte de proposer une diffusion sur internet qui respecte l’anonymat des jeunes.
Merci à Sébastien, l’éducateur des jeunes et le porteur du projet au sein de la structure, toujours disponible et motivé, et qui a géré à la perfection la logistique et l’organisation de nos séances.